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Revue de presse internet : « Job dating » pour enseignants : l’éducation n’est pas un coup d’un soir

A nouveau, ce blog va porter à votre connaissance un encart assez complet qui se propage sur internet. La thématique est «l’éducation».

Le titre (« Job dating » pour enseignants : l’éducation n’est pas un coup d’un soir) est évocateur.

Le chroniqueur (présenté sous la signature d’anonymat
) est reconnu comme quelqu’un de sérieux pour plusieurs autres éditoriaux qu’il a publiés sur internet.

Il n’y a aucune raison de ne pas croire du sérieux de ces révélations.

Sachez que la date d’édition est 2022-06-04 01:15:00.

Au commencement était un constat d’urgence. Voici le mois de juin, et plus de 1000 professeurs manquent à l’appel dans l’académie de Versailles pour la rentrée de septembre 2022. Personne n’est vraiment prêt à assumer les conséquences d’une telle pénurie. Ni les parents, bien sûr, ni les professeurs, ni l’administration. Aux grands maux, les grands remèdes. Voici donc que le rectorat de Versailles lance des « job datings » pour recruter des professeurs contractuels à tous les niveaux (primaire et secondaire), et autres personnels scolaires. Bac + 3 requis. Trente minutes d’entretien de motivation avec un inspecteur et un conseiller pédagogique. Deal ? Deal. Une semaine de formation, un suivi pédagogique, l’affaire est dans le sac. On n’arrête décidément pas le progrès, surtout quand il est une réponse à la crise des vocations que révèlent d’année en année les concours de recrutement, et par ailleurs un remède à la nullité des candidats auxdits concours, aboutissant à un refus des jurys de pourvoir l’intégralité des postes prévus afin – soin louable – de n’y point nommer de cancres patentés. On ne sait pas si les contractuels recrutés par « job dating » seront bien plus brillants, mais enfin, ils ne deviennent pas fonctionnaires – et puis, nécessité fait loi. 

Vous avez dit nécessité ? Le « job dating » est assez neuf au royaume de l’enseignement, mais il est courant dans certains secteurs économiques. Quand émerge dans les entreprises un besoin urgent et massif de main-d’oeuvre peu qualifiée, c’est une des manières de faire. Beaucoup d’agents bancaires ont été recrutés ainsi dans les années 2000, lorsque l’ouverture très rapide d’agences était stratégique (elle a cessé de l’être). Ce « job dating » est d’ailleurs lui-même inspiré d’une autre forme de nécessité, plus viscérale encore : le speed dating. En quelques minutes de conversation, trouver la bonne personne pour une nuit, et plus si affinités. Deal ? Deal.  

« Ni les élèves ni les parents n’auront la faculté d’aller voir ailleurs. Ils seront captifs des choix faits »

On voit bien le système, mais profondément, une gêne nous taraude. Elle n’est pas liée à la défense d’intérêts catégoriels. Elle n’est pas due non plus au plagiat par l’Education nationale des méthodes du privé. Peu nous chaut, à dire vrai. Elle tient à un sentiment de grande confusion. Tout d’abord, les entreprises qui recrutent ainsi vont mettre entre les mains des recrues, dans le meilleur des cas, des clients qui, s’ils sont mécontents du service, iront voir ailleurs. Les speed datings offrent une relation de courte durée qui, si elle ne satisfait pas, relancera la roue de la bonne fortune. Chaque partie prend son risque. Ni les élèves ni les parents n’auront la faculté d’aller voir ailleurs. Ils seront captifs des choix faits. Mais voici l’essentiel : le client vous confie de l’argent à gérer, sa machine à laver, la climatisation de sa maison. La relation d’un soir fait don de son épiderme. Rien d’irréparable. Aux professeurs nous confions le soin de ce que nos enfants ont en réalité de plus individuel et de plus précieux : leur esprit.  

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L’éducation n’est pas un coup d’un soir. L’instruction ne repose pas sur un deal. Il y faut, d’abord, un savoir construit, qu’on n’apprend pas dans les carrières du marketing ou de la pub ou de je ne sais quoi. Le rapport intime et exigeant à une discipline est le socle granitique de tout enseignement. Il faut avoir lu davantage. En savoir plus. En savoir, même, trop, pour enseigner un peu. Sans cette intimité conçue de longue main, l’enseignement est une fraude. Et puis, il faut le désir de transmettre, qui ne saurait être un idéal gazeux, mais est profondément lié à ce qu’on veut transmettre – un savoir – et à la façon dont on veut transmettre. L’enseignement à cet égard est une profession, mais aussi un art : l’équation personnelle y joue un rôle central. Une classe n’est pas un rendez-vous client : c’est une rencontre d’esprits. 

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Certes, tous les dévoiements en sont possibles ; le découragement, la déception, l’échec même des profs comme des élèves est une réalité – comme le sont les succès et les moments irremplaçables où le miracle se produit. C’est le coeur sacré de notre république. Or, tout sacré exige une initiation. Tout ce qui touche à l’esprit exige une éducation. Le « job dating » constitue une affreuse banalisation – pour ne pas dire une profanation – de ce qui, encore, demeure de glorieux dans notre histoire républicaine : une croyance dans le savoir, dans l’esprit, dans l’éducation fondée sur le temps long, la discipline, la patience. Tout cela est quand même vaguement barbare. Et, pour tout dire, carrément vulgaire. 


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Bibliographie :

Anthélia Mélincourt,Le livre .

L’Éducation sentimentale, éd. Conard, 1910/Opinion de la presse,A voir et à lire. .

Nos enfants ont-ils droit à l’art et à la culture ?,(la couverture) .

Recettes de villages qui bougent/Vendée/Moules à l’ail,Le livre .